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L’Echo - "La réaction des bourses au coronavirus n'a pas grand-chose à voir avec l'investissement"

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"Celui qui investit dans de bonnes entreprises n'a pas de souci à se faire, même lors d'une crise telle que celle-ci." C'est ce qu'affirme le gestionnaire de fonds britannique Terry Smith, à qui ses performances boursières ont valu le surnom de Warren Buffett européen.

Fin février, avant la tempête provoquée par le coronavirus, nous avons rencontré Terry Smith (66 ans) dans son bureau londonien qui, du 16e étage, offre une vue magnifique sur Londres. Tout en posant pour le photographe, Terry Smith continue à parler des entreprises dans lesquelles il investit. "Cela ne ressemble-t-il pas au siège social de Diageo?" demande-t-il à voix haute? Les boissons alcoolisées de Diageo  DGE1,39% ne sont qu’un des produits de consommation qui garnissent les vitrines de son bureau. "Investir est tellement abstrait que j’ai eu envie d’apporter une touche tangible aux entreprises dans lesquelles nous investissons, y compris pour nos collaborateurs. C’est ce qui explique notre petite exposition de biscuits, d’articles de toilette et de médicaments", raconte le gestionnaire.

Terry Smith ne se rend à Londres que quelques fois par an. Son fonds, il le gère à partir de l’Ile Maurice. Aujourd’hui, il est au Royaume-Uni pour l’assemblée générale des actionnaires du fonds. "Nous attendons ce soir 1.200 investisseurs. Un record", explique-t-il. Avec son fonds d’actions, qu’il a créé en 2010, il a réussi chaque année à faire mieux que le marché (MSCI World), ce qui lui a valu le statut de Warren Buffett européen. Pendant le krach lié au coronavirus, le fonds a relativement bien résisté (depuis le début de l'année: -20,9% en euro versus -28,9% pour MSCI World)

Son fonds amiral gère aujourd’hui 18 milliards de livres sterling. "Un jour arrivera sans doute où les actifs sous gestion diminueront. Mais même alors, je ne changerai pas ma stratégie", explique l’expert, qui affiche au compteur 46 années d’expérience boursière.

Cette détermination s’observe également dans un de ses hobbies, le kick-boxing. "C’est un des sports les plus brutaux. En même temps, c’est l’un des plus nobles et plus élégants. Le respect entre les boxeurs est immense. Mais pour remporter un match, il faut être déterminé. Lors de chaque affrontement, celui qui gagne est souvent celui qui est prêt à mourir", confie-t-il.

Ces dernières années, vous avez remporté avec brio les matchs entre gestionnaires de fonds. Comment réussissez-vous à identifier les entreprises gagnantes, alors que cela semble plus difficile pour vos confrères?

Je constate que la majorité des sociétés de gestion de fonds ne font pas ce qu’elles disent. Elles n’investissent pas dans des entreprises de qualité, mais dans ce que je qualifierais de camelote. Elles cherchent avant tout des entreprises bon marché. Mais ce n’est pas la priorité pour un investisseur. La première question à se poser, c’est: "Est-ce que j’ai envie d’être actionnaire de cette entreprise?". Bien entendu, on trouve des gestionnaires qui voient plus loin, mais tout dépend aussi de la manière dont elles analysent les entreprises. Certains disent: nous rencontrons le management et nous posons des questions. J’estime que ce n’est pas une bonne façon de connaître une société. Les gestionnaires de fonds ne doivent pas être des psychologues. Si une entreprise est performante, cela se reflète dans ses chiffres. Il faut donc analyser en profondeur les rapports annuels. Mais la majorité des analystes et gestionnaires de fonds ne prennent même pas la peine de les lire.

Comment pouvez-vous en être certain?

Lorsque nous avons lancé notre fonds en 2010, nous avons analysé IBM. En étudiant le rapport annuel et en faisant nos calculs, nous avons remarqué une différence de 1,9 milliard de dollars dans les cash-flows repris dans le rapport. Lorsque nous avons posé la question à la société, elle nous a donné raison. Eh bien, ces chiffres avaient été publiés neuf mois plus tôt. Aucun analyste ou gestionnaire de fonds n’avait posé la moindre question à IBM à ce sujet. C’est très différent de lire un rapport annuel dans son bain et de passer tous les chiffres au crible.

Eplucher un rapport annuel est une chose, mais pour investir, ne faut-il pas aussi anticiper?

C’est la raison pour laquelle nous investissons dans des entreprises prévisibles. Nous n’investissons par exemple jamais dans le secteur de la biotech. La commercialisation d’un médicament se fait en quatre étapes et il y a une chance sur 10.000 qu’un médicament en phase 1 soit finalement approuvé. Et nous voudrions que les investisseurs, qui ne sont pas des scientifiques, puissent le prédire? L’entreprise en est elle-même incapable. Par contre, je sais plus ou moins combien de mouchoirs en papier (il pointe une boîte dans une des vitrines) seront vendus l’an prochain. Les tendances ne varient pas de manière radicale dans ce secteur.

La disruption ne peut-elle pas bouleverser les modèles de rentabilité de certains secteurs?

Je trouve qu’il est exagéré de parler de disruption. Ce n’est pas aussi dramatique que ce que certains laissent entendre. Nous avons connu de nombreuses disruptions dans le passé. Certains disent que les choses vont plus vite aujourd’hui, mais je n’en suis pas convaincu. Prenez l’industrie textile. Les machines à filer ont provoqué une énorme disruption. Des ouvriers, connus sous le nom de Luddites, ont cassé des machines à coups de marteau pour protester contre ces changements. Le secteur du transport a lui aussi connu une énorme disruption. Nous sommes passés des canaux aux chemins de fer et ensuite aux autoroutes. Et la communication a évolué rapidement: télégraphe, téléphone, radio, télévision. La disruption est à l’œuvre depuis plus de deux siècles.

Investissez-vous aussi dans les actions FAANG (Facebook, Amazon, Apple, Netflix et Google/Alphabet)?

Nous n’avons investi que dans Facebook. L’entreprise affiche 30% de rendement sur capitaux et croît de 30% par an. Ce rythme finira par ralentir, mais Facebook compte aujourd’hui 2 milliards d’utilisateurs et est devenue très importante pour les entreprises de biens de consommation. Les départements de marketing ne regardent que Facebook et Google. Par contre, nous n’investissons pas dans Google. L’entreprise a beau former une sorte de duopole avec Facebook pour la publicité, ses rendements sur capitaux ne sont pas exceptionnels. Et nous pensons avoir compris pourquoi. Depuis sa création, l’entreprise a déjà réalisé 200 acquisitions, qui se sont toutes soldées par une catastrophe. Google a racheté ces entreprises pour tuer la concurrence.

Que pensez-vous d’Amazon et de Netflix?

Amazon ne produit pas de cash, ce qui est problématique. Les commandes se montent en moyenne à 8,32 dollars, alors que le coût moyen pour exécuter ces commandes se monte à 10,59 dollars. Certains disent qu’Amazon est un organisme de bienfaisance pour les consommateurs, financé par Wall Street. Je suis d’accord. Nous ne détenons pas non plus d’actions Apple, qui doit clairement ses performances passées au travail de Steve Jobs. Aujourd’hui, les communiqués de presse d’Apple ne parlent pas de cash-flow ou de chiffre d’affaires, mais d’une seule chose: la vente d’iPhones. Nous n’avons pas non plus investi dans Netflix. Ils sont en pleine guerre du streaming, en concurrence avec Apple, Amazon, Disney, etc. Je n’ai aucune idée de qui gagnera la guerre. Brian Pitman, l’ancien CEO de Lloyds Banks, a un jour déclaré: certains secteurs ne produisent aucun gagnant, mais uniquement des perdants.

Avez-vous des sociétés belges sur votre radar?

Non, nous ne détenons pour l’instant aucune action belge. D’abord, vu la taille de notre fonds, nous sommes obligés d’investir dans de grandes entreprises. De plus, aucune entreprise belge ne rencontre nos critères de qualité. Nous sommes depuis longtemps négatifs sur AB InBev. Cette entreprise n’a jamais eu un modèle opérationnel durable. Elle n’a jamais réussi à afficher une croissance organique digne de ce nom. Les économies de coût sont impressionnantes, certes, mais personne ne peut croître sur le long terme uniquement en réduisant les coûts. En particulier sur un marché qui est menacé par le renforcement des règles en matière de consommation d’alcool.

"Il arrivera bien un moment où nos résultats seront moins bons. Personne ne peut être le meilleur chaque année. C’est impossible."

Nous n’investissons pas davantage dans le secteur bancaire ou les assurances et n’avons donc jamais envisagé d’acheter KBC ou Ageas. Nous évitons aussi la chimie. Solvay ne se trouve pas non plus sur notre liste. Selon moi, la meilleure entreprise belge est Colruyt. Elle est très bien gérée, mais se heurte aux frontières du pays. Le problème, c’est que les supermarchés ne s’exportent pas. Lorsqu’ils essaient de s’implanter à l’étranger, c’est souvent une catastrophe. Regardez ce qui est arrivé à TescoMarks & Spencer et Carrefour.

Quelle est l’entreprise de votre fonds qui vous convainc le plus?

A long terme, sans aucun doute L’Oréal. C’est une société fantastique. C’est le plus grand acteur mondial du secteur des cosmétiques, aux mains d’un actionnaire familial, et donc bien géré. Et elle affiche d’énormes marges bénéficiaires. Elle vend ses produits cinq fois plus cher que leur valeur. L’Oréal dispose d’un énorme pouvoir de marché. Parce qu’elle ne vend pas un produit, mais du rêve. Et le rêve n’est jamais bon marché. L’Oréal figure sur de nombreuses listes comme étant une entreprise très durable. Elle a aussi intelligemment misé sur la digitalisation. Auparavant, les cosmétiques se vendaient dans les grands magasins et les publicités paraissaient dans les magazines. Aujourd’hui, le marketing se fait via les réseaux sociaux.

Vous ne revendez des actions que lorsque vous pensez que vous vous êtes trompé. Au vu de vos résultats, on peut conclure que vous ne vous êtes pas souvent trompé…

Oh si, je me trompe souvent. Mon erreur la plus courante, c’est de revendre des actions qui affichent ensuite de très bons résultats. Je peux citer Domino’s Pizza. Ce qui compte plus que la revente, c’est la discipline pour s’en tenir à la qualité. Bien entendu, nous ne pouvons pas échouer en ayant en portefeuille les 28 meilleures entreprises au monde. Idem si nous achetons une société dont les résultats ne sont pas aussi bons qu’espéré. Mais nous échouerons si nous investissons régulièrement dans des entreprises de mauvaise qualité. La seule chose importante, c’est le rendement sur capitaux et les bénéfices réalisés par les entreprises.

Vous gérez plus de 18 milliards de livres. Ne craignez-vous pas le moment où les choses iront un peu moins bien?

Je suis persuadé que ce moment arrivera, mais nous investissons à long terme, avec un horizon de placement éloigné. Si les gens ne partagent pas notre vision, alors nous leur conseillons clairement de ne pas investir chez nous. C’est la même chose avec les courses de vélo. Aucun coureur ne gagne toutes les étapes du Tour de France. Nous ne remporterons pas non plus toutes les étapes, mais nous gagnerons le Tour.

Cette ambition ne crée-t-elle pas une certaine pression?

Nous expliquons clairement ce que nous faisons. Nous publions un manuel avec notre philosophie d’investissement, que nous distribuons à tous les détenteurs de parts de notre fonds. Chaque année, nous envoyons également une lettre à nos actionnaires et nous organisons une réunion, comme celle de ce soir. Mais je comprends très bien que, quels que soient nos efforts, il y en aura toujours qui ne l’auront pas vu ni entendu. Et même s’ils ont écouté, certains réagiront de manière émotionnelle et vendront leurs parts. Il n’y a pas grand-chose que je puisse faire sinon continuer à expliquer ce que nous faisons et m’en tenir à notre stratégie.

Le risque n’existe-t-il pas que vous preniez des décisions sous la pression émotionnelle?

Cela fait 46 ans que je travaille dans le secteur. J’ai déjà vécu pas mal de choses. Lorsque j’ai commencé en 1973, le secteur minier était en grève. Nous n’avions de l’électricité que trois jours sur cinq, l’inflation était de 24% par an et plusieurs banques ont déposé le bilan. Quelques années plus tard, sous la présidence de Volker et Reagan, les taux sont passés à 15%. En 1987, nous avons eu un lundi noir avec une chute de 22,6% du Dow Jones. En 1992, suite à l’invasion du Koweït, le prix du pétrole a grimpé à 140 dollars le baril. Et en 1997, nous avons vu le naufrage de LTCM et plus tard, la faillite de la Russie. En 2000, il y a eu la crise internet, suivie de la crise financière quelques années plus tard. Tout ceci pour dire que j’ai déjà vu se produire beaucoup de choses et qu’il en faudra beaucoup pour que je commence à m’inquiéter.

Que pensez-vous de la crise du coronavirus?

Elle a bien entendu un impact sur les entreprises et l’économie, mais il ne faut pas exagérer. En 2008-2009, le monde a connu au moins trois trimestres de recul de l’économie. Aujourd’hui, nous n’en sommes pas encore à un trimestre de baisse. En 2008-2009, les revenus des entreprises de notre portefeuille ont continué à augmenter alors que les cours de bourse baissaient. Notre stratégie ne se base pas sur la baisse éventuelle du cours d’une action, mais sur la manière dont une entreprise se comporte en temps de crise économique. La réaction des bourses au coronavirus m’en dit plus sur l’hystérie collective que sur les investissements. La clé, c’est d’investir dans les bonnes entreprises. Si vous le faites et que vous êtes capable de vivre sans avoir les yeux rivés en permanence sur les écrans Bloomberg, vous vous en sortirez très bien.

Les investisseurs peuvent facilement souscrire des parts de votre fonds via votre site internet. Pourquoi cette approche?

Nous vivons au XXIe siècle. Les gens réservent leurs tickets et achètent des vêtements en ligne. Pourquoi n’achèteraient-ils pas des fonds en ligne? Nous avons mis en place ce système dès le début. Nous ne le considérons pas comme un problème, mais plutôt comme une manière efficace de communiquer, car nous sommes en contact direct avec les investisseurs. Les intermédiaires créent du bruit de friture et doivent être rémunérés. Et ils n’améliorent pas toujours la communication.

De nombreux acteurs du secteur financier sont négatifs à propos du Brexit. Vous êtes plutôt positif. Pourquoi?

Je trouve que l’Union européenne est une institution non démocratique. C’est une puissance commerciale mercantile, qui n’est pas basée sur le libre échange. Je pense que c’est le bloc le moins concurrentiel au monde. Cela fonctionne pour quelques Etats membres, comme l’Allemagne, qui sont fortement axés sur l’exportation. J’estime que le Brexit est une bonne chose pour les Britanniques. Et même si je me trompe, où est le problème, puisque c’est la volonté de la population? J’ai participé récemment à un débat télévisé avec une Norvégienne. Elle était agacée par le fait que les discussions sur le Brexit soient toujours axées sur l’économie. Un moment donné, elle a demandé: "Quel est le problème si les citoyens ou les nations prennent des décisions qui leur donnent le contrôle, même si c’est négatif pour leur économie? Quelle loi interdit les divorces décidés de commun accord parce qu’ils pourraient être économiquement préjudiciables?" J’ai trouvé cette question très pertinente. Nous ne devons pas non plus exagérer l’importance économique du Brexit. Le Royaume-Uni ne représente que 3% de l’économie mondiale, contre 16% pour l’Europe.

Qu’avez-vous appris de vos parents?

Ma mère se serait sentie humiliée si elle avait fait du tort à quelqu’un. Elle n’a jamais fait de mal à personne. Cela a encore toujours un grand impact sur moi. Dans tout ce que je fais, je me demande ce qu’elle aurait pensé.

Est-ce de votre mère que vous tenez votre pouvoir de persuasion?

Non, probablement de mon père. J’ai grandi dans un milieu pauvre. Mon père était intelligent, mais il n’avait pas fait d’études. Il m’a appris qu’il ne fallait pas toujours douter de soi-même. Quand vous avez raison, vous avez raison.

Avez-vous transmis ces leçons à vos enfants?

Mes enfants sont des privilégiés. Je suis prêt à les aider pour faire quelque chose, mais pas pour ne rien faire. Car cela les détruirait. Une de mes filles est chirurgienne-vétérinaire, elle est également championne d’Europe d’haltérophilie dans la catégorie poids léger. Elle ne pèse que 50 kilos, mais est capable de lever 68 kilos. J’ai laissé à mes enfants la liberté de faire leurs propres choix. Mais je leur ai dit que s’ils souhaitaient travailler dans le secteur des fonds, ce ne serait pas avec moi.

Est-ce que vos enfants vous demandent parfois quand vous prendrez votre retraite?

Non, ils me connaissent trop bien: ils savent que ce n’est pas pour demain. Il faudra bien entendu que je m’arrête un jour, mais ce ne sera probablement pas de ma propre volonté et certainement pas aujourd’hui. Ce serait ridicule.

Biographie

Terry Smith

Né le 15 mai 1953.

A étudié l’histoire au University College à Cardiff et détient un MBA de The Management College.

A travaillé successivement pour Barclays (1974-1983), Greenwell & Co (1984-1990), UBS (1990-1992) et Collins Stewart (1992-2000), chez ce dernier notamment en tant que CEO et président du Conseil d’administration.

A créé FundSmith en 2010, où il gère trois fonds.

 

English translation: 

L'Echo - "The stock market reaction to the coronavirus has little to do with the investment"

"Anyone who invests in good companies has nothing to worry about, even during a crisis like this." That's what British fund manager Terry Smith says, whose stock market performance has earned him the nickname of European Warren Buffett.

At the end of February, before the coronavirus storm, we met Terry Smith (66) in his London office which, on the 16th floor, offers a magnificent view of London. While posing for the photographer, Terry Smith continues to talk about the companies in which he invests. "Doesn't this look like Diageo's head office?" he asks out loud? Diageo   DGE 1.41% alcoholic beverages are just one of the consumer products that line the windows of his office. " Investing is so abstract that I wanted to bring a tangible touch to the companies in which we invest, including for our employees. This explains our small exhibition of cookies, toiletries and medicine, "says the manager.

"The stock market reaction to the coronavirus tells me more about collective hysteria than about investments."

Terry Smith only visits London a few times a year. His fund, he manages it from Mauritius. Today he is in the UK for the fund's general meeting of shareholders. "We are expecting 1,200 investors tonight. A record," he said. With his equity fund, which he created in 2010, he succeeded each year in doing better than the market (MSCI World) , which earned him the status of European Warren Buffett. During the crash linked to the coronavirus, the fund held up relatively well (since the start of the year: -20.9% in euros versus -28.9% for MSCI World)

Its flagship fund today manages £ 18 billion. "A day will undoubtedly come when the assets under management will decrease. But even then, I will not change my strategy ", explains the expert, who has 46 years of stock market experience on the clock.

This determination is also seen in one of his hobbies, kick-boxing. "This is one of the most brutal sports. At the same time, it is one of the most noble and elegant. The respect between the boxers is immense. But to win a match, you have to be determined . At each confrontation, the one who wins is often the one who is ready to die, "he said.

In recent years, you have successfully won matches between fund managers. How do you manage to identify the winning companies, when it seems more difficult for your colleagues?

I find that the majority of fund management companies do not do what they say. They don't invest in quality companies, but in what I would call junk. They are looking above all for inexpensive businesses. But this is not the priority for an investor. The first question to ask is, "Do I want to be a shareholder in this company?". Of course, there are managers who see further, but it also depends on how they analyze companies. Some say: we meet the management and we ask questions. I don't think it's a good way to get to know a company. Fund managers should not be psychologists. If a company is performing well, this is reflected in its figures. Annual reports must therefore be analyzed in depth. But the majority of analysts and fund managers don't even bother to read them.

How can you be sure?

When we launched our fund in 2010, we analyzed IBM. By studying the annual report and making our calculations, we noticed a difference of $ 1.9 billion in the cash flows included in the report. When we asked the question to the company, it proved us right. Well, those figures had been released nine months earlier. No analyst or fund manager had asked IBM any questions about it. It is very different to read an annual report in your bath and to sift through all the numbers .

Peeling an annual report is one thing, but to invest, is it not also necessary to anticipate?

This is the reason why we invest in predictable companies . For example, we never invest in the biotech sector. Marketing a drug is done in four stages and there is a 1 in 10,000 chance that a phase 1 drug will ultimately be approved. And we would like investors, who are not scientists, to be able to predict it? The company cannot do it itself. By cons, I know more or less how many tissues (he points a box in one of the windows) will be sold next year. The trends do not vary radically in this sector.

Can disruption not upset the profitability models of certain sectors?

I find it exaggerated to speak of disruption. It is not as dramatic as some suggest. We have experienced many disruptions in the past. Some say things are going faster today, but I am not convinced. Take the textile industry. The spinning machines caused a huge disruption. Workers, known as Luddit, broke machines with a hammer to protest the changes. The transportation sector has also experienced a huge disruption. We went from the canals to the railways and then to the highways. And communication has evolved rapidly: telegraph, telephone, radio, television. Disruption has been at work for over two centuries.

Do you also invest in FAANG stocks (Facebook, Amazon, Apple, Netflix and Google / Alphabet)?

We only invested in Facebook. The company shows 30% return on capital and grows by 30% per year. This pace will eventually slow, but Facebook now has 2 billion users and has become very important for consumer goods companies. Marketing departments only look at Facebook and Google. However, we do not invest in Google. The company may form a kind of duopoly with Facebook for advertising, its returns on capital are not exceptional. And we think we understand why. Since its creation, the company has already made 200 acquisitions, all of which ended in disaster. Google bought these companies to kill the competition.

What do you think of Amazon and Netflix?

Amazon does not generate cash, which is problematic. Orders average $ 8.32, while the average cost to fulfill these orders is $ 10.59. Some say that Amazon is a consumer charity funded by Wall Street. I agree. We also don't own Apple stock, which clearly owes its past performance to Steve Jobs' work. Today, Apple press releases do not talk about cash flow or turnover, but only one thing: the sale of iPhones. We also did not invest in Netflix. They are in the middle of the streaming war, competing with Apple, Amazon, Disney, etc. I have no idea who will win the war. Brian Pitman, the former CEO of Lloyds Banks, once said: some sectors produce no winners, only losers.

Do you have Belgian companies on your radar?

No, we do not currently hold any Belgian shares. First, given the size of our fund, we are forced to invest in large companies. In addition, no Belgian company meets our quality criteria. We have long been negative on AB InBev. This company has never had a sustainable operating model. It has never managed to display organic growth worthy of the name. The cost savings are impressive, yes, but no one can grow in the long run just by cutting costs. In particular in a market which is threatened by the tightening of the rules on alcohol consumption.

We do not invest more in the banking or insurance sector and therefore have never considered buying KBC or Ageas. We also avoid chemistry. Solvay is not on our list either. In my opinion, the best Belgian company is Colruyt . It is very well managed, but runs up against the country's borders. The problem is that supermarkets are not exported. When they try to settle abroad, it is often a disaster. Look what happened to TescoMarks & Spencer and Carrefour.

Which company in your fund convinces you the most?

In the long term, without a doubt L'Oréal. It is a fantastic company. It is the world's largest player in the cosmetics sector, owned by a family shareholder and therefore well managed. And it has huge profit margins. She sells her products five times more expensive than their value. L'Oréal has enormous market power. Because it does not sell a product, but a dream. And the dream is never cheap. L'Oréal appears on many lists as being a very sustainable company. She also cleverly bet on digitalization. Previously, cosmetics were sold in department stores and advertisements appeared in magazines. Today, marketing is done via social networks.

You only sell stocks when you think you were wrong. In view of your results, we can conclude that you were not often wrong ...

Oh yes, I am often wrong. My most common mistake is to resell stocks which then show very good results. I can quote Domino's Pizza. What matters more than resale is the discipline to stick to quality. Of course, we cannot fail by having the 28 best companies in the world in our portfolio. Ditto if we buy a company whose results are not as good as expected. But we will fail if we regularly invest in poor quality companies. The only important thing is the return on capital and the profits made by the companies.

You manage over 18 billion pounds. Do you not fear the moment when things will go a little worse?

I am confident that this moment will come, but we are investing for the long term, with a long investment horizon. If people do not share our vision, then we clearly advise them not to invest with us. It's the same with bicycle racing. No rider wins all stages of the Tour de France. We will not win all stages either, but we will win the Tour.

Doesn't this ambition create some pressure?

We clearly explain what we do . We publish a manual with our investment philosophy, which we distribute to all unit holders of our fund. Each year we also send a letter to our shareholders and organize a meeting, like the one this evening. But I understand very well that, no matter how hard we try, there will always be some who have not seen or heard it. And even if they have listened, some will react emotionally and sell their shares. There is not much I can do except continue to explain what we are doing and stick to our strategy.

Doesn't the risk exist that you make decisions under emotional pressure?

I have been working in the sector for 46 years. I have already experienced a lot. When I started in 1973, the mining sector was on strike. We only had electricity three out of five days, inflation was 24% a year, and several banks filed for bankruptcy. A few years later, under the presidency of Volker and Reagan, the rates rose to 15%. In 1987, we had a black Monday with a 22.6% fall in the Dow Jones. In 1992, following the invasion of Kuwait, the price of oil climbed to $ 140 a barrel. And in 1997 we saw the sinking of LTCM and later the bankruptcy of Russia. In 2000, there was the internet crisis, followed by the financial crisis a few years later. All this to say that I have already seen many things happen and thatit will take a lot for me to start worrying .

What do you think of the coronavirus crisis?

Of course, it has an impact on businesses and the economy, but we must not exaggerate. In 2008-2009, the world experienced at least three quarters of economic downturn. Today, we are not yet in a quarter of decline. In 2008-2009, the revenues of the companies in our portfolio continued to increase while stock prices fell. Our strategy is not based on the possible fall in the share price, but on the way a company behaves in times of economic crisis.The stock market reaction to the coronavirus tells me more about collective hysteria than about investments. The key is to invest in the right companies. If you do and you are able to live without having your eyes glued permanently to Bloomberg screens, you will do very well.

Investors can easily buy units of your fund through your website. Why this approach?

We live in the 21st century. People reserve tickets and buy clothes online. Why wouldn't they buy funds online? We put this system in place from the start. We do not see it as a problem, but rather as an effective way of communicating, because we are in direct contact with investors. Intermediaries create noise from frying and must be remunerated . And they don't always improve communication.

Many players in the financial sector are negative about Brexit. You are quite positive. Why?

I find the European Union to be an undemocratic institution. It is a mercantile trading power, which is not based on free trade. I think it is the least competitive block in the world. This works for some member states, such as Germany, which have a strong export orientation. I think Brexit is a good thing for the British. And even if I am wrong, where is the problem, since it is the will of the population? I recently participated in a televised debate with a Norwegian woman. She was annoyed that the Brexit discussions were still focused on the economy. At one point, she asked, "What is the problem if citizens or nations make decisions that give them control, even if it is bad for their economy? What law prohibits divorces agreed upon because could they be economically damaging? " I found this question very relevant. Nor should we exaggerate the economic importance of Brexit. The United Kingdom only represents 3% of the world economy, compared to 16% for Europe.

What did you learn from your parents?

My mother would have felt humiliated if she had hurt someone. She never hurt anyone. It still has a big impact on me. In everything I do, I wonder what she would have thought.

Do you hold your power of persuasion from your mother?

No, probably from my father. I grew up in a poor environment. My father was smart, but he hadn't studied. He taught me that you shouldn't always doubt yourself. When you are right, you are right.

Have you passed these lessons on to your children?

My children are privileged. I am ready to help them to do something, but not to do nothing. Because it would destroy them. One of my daughters is a veterinary surgeon, she is also a European weightlifting champion in the light weight category. She weighs only 50 kilos, but is able to lift 68 kilos. I gave my children the freedom to make their own choices. But I told them that if they wanted to work in the fund industry, it wouldn't be with me.

Do your children sometimes ask you when you will retire?

No, they know me too well: they know it's not for tomorrow. Of course I will have to stop one day, but it will probably not be of my own free will and certainly not today. It would be ridiculous.

Biography

Terry Smith

Born May 15, 1953.

Studied history at University College in Cardiff and holds an MBA from The Management College.

Successively worked for Barclays (1974-1983), Greenwell & Co (1984-1990), UBS (1990-1992) and Collins Stewart (1992-2000), with the latter notably as CEO and Chairman of the Board of Directors .

Founded Fundsmith in 2010, where he manages three funds.

 

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